EXTRAITS

Brouillards d'automne

par: Hélène Léveillée

 

 

 

 

 

 

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Alain Bellemare

59,35

ARPENTS

« Vous savez, la terre a’basse, Mossieu Bellemort… la terre a’basse!», avait chanté l’imposant Victor Dietrich. Il se tenait debout, derrière deux planches de bois couchées sur de vieux fûts de chêne qui avaient terminé leur noble carrière dans la décoration viticole; le comptoir du chai du vignoble Dietrich-Jooss.  Et il souriait, le grand Dietrich, toutes dents dehors, les mains battantes, imposantes; deux longs volets de grange au vent. Sa rengaine, il l’avait modulée tout d’une traite, comme la cigale l’été; elle, affairée à jouer sa partition démente sur les bras qui couraient le long des fils de fer de ses rangs de vignes; lui, se tuant à travailler en musique avec une gaieté folle dans son vignoble situé de l’autre côté de Saint-Jean-sur-Richelieu. Le travail bien fait, c’était sa passion; le vin… sa vie!

  Son charmant accent, il l’avait hérité d’une cambrousse perdue du fin fond de son Alsace natale. Il n’arrêtait pas de chantonner, comme un vieux disque aux sillons rayés par l’usure et qui saute à force de jouer la même chose :

  « La terre a’basse, vous savez… la terre a’basse!... »  - Oui! Je le sais qu’elle est basse, la terre, M. Dietrich… Je le sais… Vous n’avez pas besoin de me le rappeler.

  Crisse! Qu’est-ce que j’étais venu faire ici, au juste?

  Je ne savais absolument pas comment réagir face à un barrage en règle comme celui-là. Les disques égratignés, je n’avais pas l’habitude de les écouter ou de les garder bien longtemps! M. Dietrich m’avait complètement déstabilisé avec ses « la terre a’basse… » à répétition, coupé mon aisance naturelle avec les mots; ils ne voulaient plus sortir de mon gosier, paniqués… J’étais fait à l’os avant d’avoir seulement débuté à le questionner!

 

 

 


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